Jaquette de Dark Souls

Dark Souls : un level design mortel

Dark Souls… Un jeu qui a révolutionné l’industrie, popularisé un nouveau genre (le Soulslike) et offert des heures de vidéos de ragequit et d’analyse de lore. Un jeu que j’ai adoré même s’il m’a énervé plus d’une fois. À l’occasion d’une énième run terminée, j’ai eu envie de vous parler de mes aventures en Lordran et de pourquoi Dark Souls est un grand jeu.

Le commencement

Nous sommes en 2023 et me voilà de nouveau devant l’écran de création de personnage. Point de personnalisation poussée de mon avatar cette fois-ci, je me contenterait d’une coupe au bol du plus bel effet. De tout façon, je vais passer les trois-quarts du jeu sous un aspect décharné le visage caché par un casque.

La classe en revanche a son importance puisque chacune propose une spécialisation de départ vous faisant économiser plusieurs niveaux si vous avez une idée du build que vous visez. Et des possibilités, il y en a énormément.

Absolument toutes les approches sont viables dans Dark Souls : magie, arc, masse et même combat à mains nues. Cette versatilité est une des premières forces du titre. Nous sommes libres (et responsables) de tous nos choix et tous les moyens sont bons pour atteindre la fin. Cette aventure est la nôtre et rien (ou presque) ne nous sera imposé.

Une vision qui se rapproche beaucoup des livres dont vous êtes le héros, qui sont à mes yeux des Dark Souls version papier.

Mais revenons à mon choix de classe.
Que choisir pour cette nouvelle partie ? Le classique mais efficace chevalier ? Le dévastateur pyromancien ? Non, je vais tenter l’originalité et choisir le mendiant.
Le mendiant, c’est le mec moyen en tout donc bon en rien.
Toutes ses stats sont au plus bas et vous commencez sans rien. Bref, c’est un peu le mode difficile de DS. Et effectivement, le début picote un peu. Mais c’est aussi extrêmement amusant de devoir se débrouiller avec ce que l’on trouve et donc de s’adapter en permanence.

Une fois sorti du Refuge des morts-vivants, j’arrive au sanctuaire de Lige-feu ; lieu qui servira de hub central pendant une bonne partie du jeu. On y rencontre divers personnages plus ou moins désespérés et glane quelques vagues indications sur la marche à suivre avant de s’aventurer vers la suite de l’aventure. Après une violente mort contre un groupe de squelettes, je décide de partir de l’autre côté vers la voie « normale ».

Création de personnage dans dark souls

L’art de nous guider sans le dire

Cette manière qu’ont les développeurs de nous guider sans le montrer et assurément un autre point fort du titre.

Que ce soit par des ennemis intimidants, un environnement plus hostile ou des pièges, notre cheminement est suggéré l’air de rien. Inconsciemment, un nouveau joueur prendra la direction du Village des Morts-vivants car la voie est face à nous lorsque l’on arrive au feu mais aussi parce les squelettes gardant les catacombes ou les fantômes de la Nouvelle-Londo risquent de l’amener bien vite sur l’écran « Vous êtes mort ».

Bien sûr, un joueur persévérant ou connaissant le jeu pourra tout à fait se frayer un chemin à travers ces zones, renvoyant une fois de plus à cette multitude d’approches possibles. Et si tout cela fonctionne très bien c’est parce que le level design de Dark Souls est exceptionnel.

Tout dans le jeu, du placement des ennemis et objets aux arrière-plans et points de vue, est pensé pour vous aiguiller vers la voie à suivre ou au contraire vous attirer dans une direction particulière.

À ce titre, je suis toujours bluffé par la quantité de zones totalement optionnelles. Le monde peint d’Ariamis et son inquiétant village enneigé ou bien encore le magnifique lac cendré sont des exemples de lieux tellement bien cachés que nombre d’aventuriers ne les ont jamais foulés. Une preuve de la véritable démesure du studio qui n’hésite pas à dissimuler des pans entiers de lore pour respecter l’univers du jeu.

Seule une observation attentive, une exploration méticuleuse et une dissection de chaque description d’objets vous permettront de trouver ces secrets. Sinon, il reste les guides Youtube et les forums, mais bon, c’est moins drôle.

Une persévérance à toute épreuve

Après avoir traversé le Village des Morts-vivants et défait le démon Minotaure, me revoilà face au fameux dragon rouge gardant le pont vers la Paroisse.

Combien de fois suis-je mort à l’époque avant de comprendre comment le passer ? Probablement cinq ou six.

Et encore une fois, plusieurs possibilités s’offrent à nous. Passer par en-dessous, courir en croisant les doigts ou bien encore tenter de le combattre en l’attirant d’une flèche bien placée, tout est possible. Personnellement, la technique consistant à le bombarder de flèches comme un lâche me plaît assez. Après tout, seule la victoire compte.

La paroisse en elle-même ne pose pas trop de difficultés (si l’on ne tient pas compte de ce satané phacochère). En revanche, elle est la première zone où l’on comprend que le monde de Dark Souls est en fait constitué de plusieurs zones interconnectées de telle sorte que le joueur ne peut qu’avoir le tournis face à la multitude de chemins s’ouvrant à lui.

Faut-il se diriger vers cette immense forteresse ? Suivre les coups de marteau retentissant plus loin ? Ou bien passer ce démon de Titanite pour s’aventurer dans Noiresouche ? À moins que vous ayez retenu ce conseil vous disant de sonner les deux cloches ? D’ailleurs les cloches se trouvent souvent en hauteur, nichées au sommet d’un beffroi.

Un peu comme celui que l’on peut voir depuis l’entrée de la zone… En nous faisant débuter notre exploration en contrebas de la paroisse face à une volée de marche, on comprend tout de suite qu’il va falloir monter. Et c’est tout naturellement que l’on va orienter la caméra vers le haut ce qui nous révélera cette tour et donc notre objectif.

Quand je vous disais que le level design était exceptionnel… Et des moments comme ça, Dark Souls en regorge. Notre objectif est presque toujours visible dès le départ et une observation attentive de l’environnement nous permettra d’élaborer notre plan de route mais aussi de déceler les pièges cachés et d’apprendre de nombreuses choses sur l’histoire du titre.

Vue d'un personnage dans Dark Souls

Oui il y a une histoire !

Car oui, contrairement à ce que de nombreux joueurs pensent, Dark Souls possède une histoire. Ou plutôt des histoires. Il y a notre quête, somme toute assez simple, qui consiste à raviver la flamme et donc permettre au monde de continuer d’exister sous cette forme ou le plonger dans les ténèbres.

Mais il y a surtout les histoires des autres personnages (Solaire, Siegmeyer…), qui rencontrent presque tous un funeste destin, et l’incroyable mythologie créée par les équipes de From Software.

L’univers du jeu est très dense et absolument tout a une signification particulière.

Pourquoi trouve-t-on cet ennemi ici ? Qu’est-ce que cette arme fait là ? Tout est justifié par le Lore du jeu qui s’étend sur plusieurs siècles et temporalités. Un véritable jeu de pistes à suivre pour comprendre le fin mot de l’histoire et réaliser que, quoi que l’on fasse, Lordran est condamnée…

Cette narration environnementale et cette importance de l’observation sont, à mes yeux, totalement anéanties par l’aspect online du jeu.

Démarrer une partie en ligne signifie voir votre écran se remplir de messages oranges vifs, de taches de sang de joueurs morts et de fantômes d’autres aventuriers. Parfois utiles, souvent trollesques, ces marques gâchent l’immersion en nous indiquant la présence de pièges ou de murs illusoires.

Cependant, et même si je n’apprécie pas spécialement cela, le online de Dark Souls fait partie intégrante du monde et est lié aux spectres sombres. Il est aussi un excellent moyen de continuer à jouer au titre, que ce soit en envahissant et affrontant d’autres joueurs ou au contraire en les aidant lors de certains combats de boss.
Libre à vous donc de choisir online ou non suivant ce que vous recherchez.

Un effet « Wahou »

De mon côté, j’atteins l’intérieur de la paroisse des Morts-vivants. Voyant un ascenseur, je l’emprunte et me souviens de l’effet « Waouh » qu’il a provoqué sur moi lorsque je me suis rendu compte qu’il me ramenait au Sanctuaire de Lige-Feu.

C’est à ce moment que l’on commence à toucher du doigt la maestria avec laquelle Miyazaki et son équipe ont conçu Lordran.

À l’exception d’une zone ou deux, l’intégralité du titre peut être parcourue à pieds sans aucune téléportation ou autre subterfuge de développeurs. Aujourd’hui encore, je suis toujours bluffé par cet ascenseur et je n’ai que très rarement retrouvé ce sentiment de faire partie d’un véritable monde cohérent dans d’autres jeux. S’en suivra un combat, ou plutôt des combats, contre les gargouilles. Gardiens de la suite du jeu, ce sont ces satanées bestioles qui s’assurent que vous ayez bien saisi le fonctionnement des combats.

Gestion de votre inventaire, placement, lecture des patterns… Tel un Zelda, patience et observation seront vos meilleures armes pour remporter la victoire. Une fois votre cible analysée, il « suffit » d’appliquer votre plan à la lettre pour vous en sortir. Sauf que les gargouilles sont aussi l’occasion pour les développeurs de vous initier à la « phase deux ».

Intervenant souvent une fois la jauge de vie du boss à moitié vide, elle symbolise ce moment où votre adversaire change de comportement.

Violence accrue, transformation ou, dans le cas présent, renfort allié, le jeu vous rappelle que vous n’êtes qu’une simple carcasse affrontant démons et autres créatures quasi divines. Un moyen de vous obliger à toujours rester sur le qui-vive et à ne jamais foncer tête baissée.

C’est aussi du pain béni pour les chaînes compilant les réactions de streamers face à ces changement brutaux de comportements. Quelques morts plus tard, les gargouilles ne sont plus qu’un mauvais souvenir et la première cloche retentit sur ce royaume désolé.

Gargouille dans dark souls

Une suite toujours autant passionnante

Suite à cet affrontement au sommet, il faudra prendre la direction des Profondeurs, qui sont toutefois optionnelles, avant d’atteindre le Hameau du crépuscule.

Une zone sombre, parsemée d’embûches, d’ennemis redoutables et ou le poison vous donnera du fil à retordre. Probablement l’un des environnements les plus compliqués à traverser pour une première fois surtout à l’époque sur PS3… Ce lieu était connu pour ses chutes de framerates assez sévères, heureusement corrigées dans la version Remastered.

Après un combat expéditif contre la magnifique Quelaag, la seconde cloche résonne ouvrant ainsi les portes de la Forteresse de Sen. Une forteresse qu’aurait adoré Kevin McCallister tant elle regorge de pièges fourbes et mortels. Sa traversée est d’autant plus éprouvante que le seul feu de la zone est placé à la fin de celle-ci… Patience, observation, tout ça, tout ça… Direction ensuite ce qui conclut la première moitié de Dark Souls : Anor Londo. Le plan où l’on surplombe la cité est magnifique mais également très riche en information.

L’intelligence des développeurs frappe à nouveau et si notre objectif est clairement visible, le chemin pour y accéder est extrêmement tortueux et vous fera passer par balcons, corniches et autres couloirs gardés par les chevaliers d’argent responsables de nombre de morts.

La première moitié du jeu s’achèvera sur l’un des combats les plus durs du titre face au duo Ornstein et Smough. Deux chevaliers aux forces complémentaires ne laissant pas la moindre place à l’erreur. Le cadre est grandiose, la musique épique et la phase deux en aura surpris plus d’un.

From Software termine ce segment du jeu en apothéose avec un combat mettant nos réflexes et nos connaissances à l’épreuve. Une fois victorieux, une nouvelle quête nous sera confiée : alimenter le Calice Royal avec quatre puissantes âmes disséminées aux quatre coins de Lordran.

Ultime carrefour de possibilités, l’après-Anor Londo est quelque peu déstabilisant. Par où commencer ? Vers où aller ? Le monde ouvert de Dark Souls révèle ici sa dernière surprise. Une simple cinématique nous montrant des brouillards dorés se dissiper suffit à nous faire comprendre que nous sommes encore loin d’en avoir fini avec le jeu. Il reste de vastes ruines, des lacs de feu et d’immenses archives à explorer…

Discuter avec Gwynevere permet aussi de débloquer l’accès au DLC. Sorti un an après le jeu original, ce contenu additionnel vous envoie dans le passé explorer la cité d’Oolacile. Plutôt généreux en termes de contenu, il y a trois zones à explorer ainsi que quatre boss à défaire. Très important d’un point de vue du lore, ce DLC est en revanche un peu en deçà en ce qui concerne la construction des niveaux. La forêt Royale est une revisite pas très intéressante de la forêt de Noiresouche quant aux Abysses, c’est essentiellement une ligne droite remplie d’ennemis agaçants.

Seule Oolacile relève le niveau avec ses bâtiments enchevêtrés et ses nombreuses embuscades mais si une sensation de « trop » m’a frappé lors de certains passages. Rien à dire en revanche sur les boss qui figurent parmi les meilleurs du jeu.

Que ce soit au niveau du design, des patterns ou de la difficulté générale, c’est un sans-faute de ce côté. Un bel exemple de ce que devrait être un bon DLC et qui ne faisait qu’annoncer la qualité générale des contenus additionnels des prochains titres de From Software.

Une fin en apothéose

Les quatre embranchements sont éprouvants et il faudra des nerfs d’acier pour atteindre et vaincre ces quatre seigneurs. Et puis enfin, les portes de l’ultime boss s’ouvriront à nous. Une arène simple avec au centre un feu presque éteint. La musique se lance et, loin d’être une explosion épique d’instruments, seules quelques notes de piano se font entendre. Vous n’êtes pas un héros, ni même un sauveur. Vous ne faites que perpétuer ce cycle de mort sans fin en achevant cet ancien dieu n’étant plus que l’ombre de lui-même.

Jusqu’au bout Dark Souls aura mis son scénario et sa mythologie en avant et absolument toutes les autres composantes du jeu (musique, level design, gameplay, mise en scène des combats…) n’auront été qu’au service de cette histoire imaginée par Hidetaka Miyazaki et son équipe. C’est une véritable leçon de game-design qu’aura enseigné Dark Souls à toute l’industrie et c’est pour cette raison qu’il mérite sa place au Panthéon des jeux les plus marquants jamais sortis.



Suite à cela, From Software sortira un Dark Souls 2 moins marquant que son aîné avant de proposer une revisite de leur propre formule avec Bloodborne. Mais je garde ces histoires pour une prochaine fois…

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AlxZ_Rex

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J'écris mes articles à Rabanastre tout en recherchant mon courage dans Alien.

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