Scott Pilgrim prend son envol : retour gagnant pour l’idole des geeks

Oui, je sais. Ce n’est pas un jeu vidéo. Mais Scott Pilgrim emprunte tellement de codes au média vidéoludique que cette petite incartade vers le monde des séries n’est pas si aberrant que cela. Et puis c’est chouette d’ouvrir un peu ses horizons, non ? De toute façon, c’est mon site, je fais ce que je veux.

Du papier à l’écran

À l’origine, Scott Pilgrim est une série de comics en six volumes réalisée par Bryan Lee O’Malley. On y suit les aventures de Scott, un canadien de 23 ans, sans emploi et glandeur professionnel, qui tombe amoureux de Ramona Flowers, une livreuse. Seul souci, afin de pouvoir sortir avec l’élue de son cœur, il devra d’abord défaire les anciens petits amis de la belle, les sept ex maléfiques. Un humour qui fait mouche, des références geek qui ne prennent pas les fans pour des idiots et un visuel percutant assurent à la série un succès mérité récompensé par de multiples prix.

Extrait du comic original. Les six volumes existent également en couleur.

Et quand une œuvre littéraire fonctionne, il ne faut pas longtemps pour que le cinéma tente de s’en emparer. Avec un succès et une fidélité… aléatoire. Fort heureusement pour nous, Scott Pilgrim vs the World est réalisé par l’excellent Edgar Wright à l’origine de la trilogie Cornetto que je vous somme de visionner si ce n’est pas déjà fait. Wright use de son talent pour fournir un film aux dialogues hilarants, bourré d’idées sonores et visuelles au découpage efficace et au casting cinq étoiles. Bref, un très bon film pour geeks mais pas que. La sortie cinématographique sera accompagné par une adaptation vidéoludique signée Ubisoft. Le titre est un beat them all pouvant être joué jusqu’à quatre joueurs. L’univers est retranscrit de manière impeccable grâce à un pixel art maîtrisé et une bande-son de qualité. Dommage que la difficulté parfois frustrante vienne un peu casser le plaisir. Il n’en reste pas moins une bonne adaptation du matériau d’origine faisant de Scott Pilgrim l’une des rares œuvres à ne pas souffrir d’un produit dérivé honteux. Nulle surprise donc à ce que l’annonce d’une série animée exclusive à Netflix ait titillé ma curiosité.

L’excellente émission Crossed avait consacré un épisode au film.

Une Bob-omb visuelle

Aux commandes de cette série de huit épisodes, on retrouve Bryan Lee O’Malley au scénario, Edgar Wright en tant que producteur exécutif et le studio japonais Science SARU à l’animation. Ce dernier est connu pour ses expérimentations visuelles et la folie de certains plans qui ont pu être vus dans Devilman Crybaby, les épisodes « T0-B1 » et « Akakiri » de l’anthologie Star Wars Visions ou bien encore le film Lou et l’île aux sirènes. Le tout est soutenu par un retour de l’intégralité du casting du film aux doublages et une bande-son impeccable.

Chaque épisode est un déluge d’effets spéciaux, de trouvailles inventives et d’hommages à la culture Geek. Mais contrairement à la plupart des œuvres actuelles, la série ne se contente pas d’empiler des références jusqu’à plus soif juste pour contenter le fan. Ici, tout est intelligemment mis en scène et réfléchi pour servir un propos plus poussé que le simple clin d’œil. Le genre de série où l’on découvre de nouvelles choses à chaque visionnage.

Les prémices de la série reprennent le scénario des comics – et donc du film – à la lettre. On retrouve Scott qui squatte chez son pote Wallace et passe ses journées à jouer de la basse avec son groupe Sex Bob-omb. Sa vie bascule lorsqu’il rencontre Ramona Flowers au cours d’une soirée. Après une tentative de drague foireuse, puis une nuit passée avec sa bien-aimée, Scott sera confronté à Matthew Pattel, l’un des ex de Ramona. Et si dans le scénario original, il triomphe sans problème de cet adversaire, notre héros est ici vaincu à la surprise générale. Aux côtés d’un casting éploré (ou presque), le spectateur est intrigué. Comment une série Scott Pilgrim peut-elle exister sans sa tête d’affiche ? La réponse est simple : en faisant vivre tous ses autres personnages qui ne pouvaient s’exprimer pleinement jusqu’à présent.

New challengers

En éclipsant Scott de son scénario, le reste du casting gagne en épaisseur. À la manière des multivers ayant fait les beaux jours des super-héros, la série offre une nouvelle vie à ses protagonistes sous forme de “what if”. Ainsi, Knives – libérée de son amour pour Scott – se consacre pleinement à la musique alors que Neil devient (un peu) plus acteur de sa vie. Mais la plus belle évolution est celle offerte à Ramona et ses ex. En plaçant la jeune femme et sa quête au centre de l’intrigue, on assiste à ses retrouvailles avec ses anciens amours. Mais Scott étant absent, Ramona n’a d’autre choix que de faire face à son passé, elle qui a toujours fui. On découvre donc de nouvelles facettes du personnage et de ses ex pas si maléfiques. Il n’y a jamais vraiment de bons ou de méchants, ni même de véritables gagnants lors de ruptures amoureuses. Une réalité retranscrite avec justesse et humour.

En abordant l’amour sous toutes ses formes, Scott Pilgrim confirme son statut d’œuvre transgénérationnelles. Que vous soyez déjà passé par ses étapes où que vous vous trouviez en plein questionnement, il y aura forcément au moins un personnage auquel vous vous identifierez immédiatement. Avec beaucoup de tolérance et sans préjugés, la série ne tombe jamais dans le malaise ou la facilité. Le ton est juste à chaque instant soutenu par des blagues jamais lourdingues. Mention spéciale pour l’antagoniste final qui – en plus d’offrir un twist scénaristique parfait – nous montre que personne n’est à l’abri d’une erreur…

Cloud, Scott, même combat

En plus de tout ce que nous avons abordé précédemment, cette nouvelle version de l’œuvre propose une revisite méta des plus enthousiasmante. contrairement à un Matrix 4 qui se vautrait dans une pseudo-critique du système pour tenter de justifier son statut, Scott Pilgrim prend son envol profite de son format sériel pour surprendre en permanence son spectateur, qu’il soit connaisseur de l’univers ou pas. Tel Final Fantasy VII Remake qui joue avec les souvenirs et les attendus des anciens joueurs, la série prend un malin plaisir à totalement renverser les relations entre les personnages pour les envoyer dans une direction inattendue. L’habitué se prend donc au jeu des différences et peut profiter des rebondissements aux côtés des néophytes. Un bon moyen de réunir tout le monde sur le canapé, le temps de huit épisodes d’une rare qualité. Avant une suite ?

Scott Pilgrim, c’est excellent et la mouture 2023 ne déroge pas à la règle. Que vous soyez fan du comics, du jeu, du film ou totalement étranger à cet univers, la série saura vous captiver par son esthétique léchée, ses scènes d’action inventives, sa tonne de geekeries et ses thèmes abordés de fort belle manière. Une réussite.

AlxZ_Rex

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J'écris mes articles à Rabanastre tout en recherchant mon courage dans Alien.

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