Visions of Mana : le chill-RPG

15 ans. C’est le temps d’attente qu’ont dû endurer les fans de Mana pour avoir un nouveau jeu. Si la série n’a jamais vraiment disparu des radars grâce à différents portages et autres remakes, cela faisait bien longtemps qu’une aventure inédite n’avait pas vu le jour. C’est désormais chose faite avec ce Visions of Mana sorti le 31 août su PC, PS4/5 et Xbox Series. Édité par Square Enix et développé par Ouka Studios – dont nous avons appris la disparition depuis –, ce jeu valait-il le coup de patienter si longtemps ?

Test rédigé à partir d’une version PS5. Merci à Square Enix France pour l’envoi du code.

Temps de jeu : 33h pour le scénario principal, 45h pour le trophée Platine.

Avant-propos : Je n’ai joué qu’à très peu de jeux de la série. Je ne pourrais donc comparer Visions of Mana à ses prédécesseurs et ne le jugerai que sur sa proposition. Pour plus d’infos sur cette vieille licence, je vous invite à lire ce dossier qui lui est consacré.

Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil

L’équilibre fragile du monde est régi par l’Arbre Mana. C’est lui qui assure la circulation du flux de Mana avec l’aide des esprits élémentaires. Le souci, c’est que cet arbre nécessite d’être alimenté en offrandes tous les quatre ans. Et on ne parle pas ici de babioles ou de nourriture mais d’âmes. Chacune des huit régions du monde est associée à un élément (feu, eau, bois, lumière…) et doit envoyer un représentant choisi par la Fée, émissaire de la Déesse. Manquer à ce devoir coupe la région du flux de Mana et la mènera à sa disparition. Visions of Mana débute à Tiana, le village du feu, qui vient de trouver son offrande en la personne d’Hina. En tant que joueur, vous incarnez Val, le gardien d’âmes et ami/amoureux d’Hina, qui a pour mission de parcourir le monde pour retrouver toutes les offrandes et les escorter jusqu’à l’Arbre de Mana.

Val, le gentil héros

Inutile de tourner autour du pot, le scénario de Visions of Mana est sa plus grande faiblesse. Absolument tous les clichés déjà vus mille fois dans les RPG sont présents et racontés de manière plate, voire monotone. Résultat, on voit tout venir à des kilomètres et on s’ennuie un peu… D’autant plus que les développeurs ont tenu à ce que l’on ne soit pas perdus une seule seconde ce qui implique énormément de dialogues d’exposition peu naturels et une surabondance de cutscenes – parfois tous les trois pas – n’apportant rien. Si bien que sur mes 35 heures de jeu, il y en a bien une quinzaine pendant laquelle je ne jouais pas. Le coup de grâce intervenant dans le dernier tiers du jeu qui vous demande de retourner dans toutes les zones déjà visitées pour faire un bilan sur l’évolution des personnages.

Mais bon, un scénario passable peut être sauvé par des personnages attachants ou des thèmes intéressants. Dommage, ce n’est pas le cas ici. Les personnalités des divers protagonistes sont à peine esquissées et leurs émotions ne parviennent jamais à nous toucher. Val est gentil, Karina est surexcitée, Ash est un scientifique qui parle trop… Un constat aggravé par le ton du jeu en total décalage avec les thèmes abordés. Nos héros ressemblent plus à une bande de potes en road trip qu’à des êtres condamnés à mourir pour permettre aux autres de survivre quatre ans de plus. La dissonance est telle qu’il est difficile de s’investir dans l’univers quand le titre lui-même ne parvient pas à l’exploiter et le raconter. Quant à l’amour, central dans cet épisode, il servira surtout d’outil ultime pour résoudre tous les problèmes et donnera lieu à nombre de séquences un peu niaises.

La Fée choisit les Offrandes dans l’euphorie générale…

Cependant, ce constat un peu dur est à nuancer. Certes, je n’ai pas trouvé le scénario très palpitant mais c’est parce que j’en ai déjà suivi beaucoup. Pour un débutant en matière de RPG ou pour les plus jeunes, Visions of Mana propose une histoire qui se suit sans prise de tête et pourra même les surprendre par moments. Même s’ils ne sont pas véritablement creusés, les thèmes et questionnements apportés par le jeu restent intéressants et pourront pousser certains joueurs à la réflexion. Surtout que les événements racontés ne sont finalement qu’un prétexte pour nous faire voyager aux quatre coins d’un univers enchanteur.

C’est de toute beauté

Visions of Mana est un jeu très coloré aux environnements chatoyants offrant des panoramas d’une beauté à couper le souffle. Tout est mis en œuvre pour vous faire admirer le paysage grâce à d’astucieux jeux de lumière ou des dénivelés propices à quelques effets « waouh » lorsque s’étendent devant vous de vastes plaines ou des ruines anciennes. C’est assurément la plus grande force du titre, celle qui nous pousse à avancer et explorer toujours plus pour voir ce que les développeurs ont conçu ou caché. Une véritable invitation au voyage dans un cadre idyllique devenu rare en ces temps de sombre réalisme. Tous les lieux ont leur propre identité soutenue par une bande-son tout en douceur, mais peut-être un peu trop discrète. Les morceaux sont de qualité mais sont rarement sublimés par la mise en scène si bien qu’ils seront rapidement oubliés.

Seuls les emplacements de P’tit Cactus ne seront pas
affichés sur la carte

Mais loin d’être uniquement belles, les zones sont aussi très plaisantes à parcourir. Avec un double saut et la possibilité d’effectuer des dashs dans toutes les directions, nos héros se montrent très mobiles. Des capacités qui seront mises à contribution tout au long du jeu, Ouka Studios ayant rempli chaque lieu semi-ouvert d’innombrables choses à faire et collecter. Coffres, pierres élémentaires, foyers d’esprits – des sortes de défis vous imposant de défaire des vagues d’ennemis sous contrainte –, monstres rares… en découle une impression de « trop » qui s’estompe assez vite pour deux raisons. La première, c’est que le monde est faussement grand et se traverse rapidement – notamment à dos de Pikul –, la seconde, qui peut surprendre, c’est qu’absolument tous les points d’intérêt sont visibles sur la carte. Puisque ce n’est pas désactivable, le plaisir de l’exploration peut s’en trouver entaché. Reste la possibilité de masquer la mini-map pour avoir le plaisir de fouiller par soi-même mais c’est une preuve de plus que les développeurs tenaient à ce que l’on ne rate rien, quitte à nous prendre un peu trop par la main. Il n’empêche que l’on prend plaisir à tout récolter, d’autant plus que les récompenses sont toujours à la hauteur. Et là encore, cela permettra à tous de garder une trace de ce qu’il reste à faire tout en procurant un petit sentiment de satisfaction une fois une zone entièrement nettoyée.

Le très mignon Pikul ne sera pas votre seul moyen de transport !

En termes de design, si les PNJ souffrent d’un manque de variété, les héros et leurs différentes tenues sont réussis. Un travail que l’on doit à HACCAN dont vous pouvez admirer le talent ici – qui parvient à compenser les faiblesses d’écriture des personnages par des looks vraiment stylés. Les développeurs ont en plus pris la peine de personnaliser toutes les animations des héros pour laisser transparaître leurs caractères respectifs. Un souci du détail appréciable. Concernant les monstres, ils gardent cet aspect mignon emblématique de la série. Trop mignon même puisque l’on se sent presque mal d’en tabasser certains… Petit bémol en revanche pour le doublage – aussi bien japonais qu’anglais – qui est de qualité pour le casting principal mais sonne faux pour les marchands et habitants. Entendre un gamin de 12 ans parler avec une voix grave digne de Kratos est quelque peu déstabilisant.

Gros bémol pour les quêtes annexes qui sont le niveau zéro de l’intérêt, n’apportent rien sur le lore et sont beaucoup trop nombreuses. Personnellement, je vous recommande de les accepter lorsque vous les croisez mais de ne pas trop vous en soucier sur le moment. Le jeu vous faisant repasser plusieurs fois par des lieux déjà visités, autant en profiter pour les accomplir lors de ces revisites.

Donjons et baston

En tant qu’Action-RPG, Visions of Mana fait la part belle aux combats. Les ennemis sont visibles sur la carte et entrer en contact avec eux initiera un affrontement sans transition. Très classique de prime abord – taper, sauter et esquiver –, le gameplay s’étoffe au fil des heures avec l’obtention de magies à lancer via l’emblématique menu en anneau, l’équipement de graines offrant divers techniques et bonus, l’arrivée de nouveaux coéquipiers entre lesquels on peut switcher et surtout le déblocage de nouvelles classes. Au nombre de huit, elles modifient grandement la spécialisation des héros en leur attribuant de nouveaux sorts et passifs tout en leur octroyant une nouvelle apparence et la possibilité d’utiliser la relique associée à leur élément. Là encore, c’est varié et va du grappin pour attirer les adversaires au boomerang créant des tornades en passant par le canon à eau. En résulte un joyeux bazar qui parvient à rester lisible la plupart du temps. Du moins, une fois que l’on s’est habitué à la caméra qui se montre totalement à la ramasse par moments. En cause, un système de ciblage mal pensé et peu ergonomique qui peine à suivre les mouvements parfois trop rapides. Fort heureusement, les combats contre le menu fretin sont rapides et la difficulté relativement faible du titre vous mettront rarement en difficulté.

Les boss en revanche se montreront plus ardus mais également plus intéressants. C’est contre eux que le gameplay et les possibilités stratégiques seront poussés à fond. Exploitation de faiblesses, usage de malus/bonus et synergie entre les membres de l’équipe seront primordiaux pour espérer défaire certaines créatures retorses. Vos réflexes seront également mis à rude épreuve puisque certains opposants rempliront le terrain de zones d’attaques dignes de Final Fantasy XIV ou XVI. Moments très amusants, qui concluent en apothéose les donjons, ces affrontements auraient mérités d’être plus nombreux. Mention spéciale pour le boss final très réussi qui inonde l’écran d’attaques !

Le fameux menu en anneau de la série.

Quant aux donjons, ils m’ont très agréablement surpris. Loin d’être de simples couloirs, ils recèlent de petites énigmes, d’idées visuelles et ne cessent de se renouveler tout au long de l’aventure. C’est également en leur sein que vos reliques spirituelles se révéleront aussi utiles en exploration qu’en combat puisqu’à la manière d’un (ancien) Zelda, elles seront mises à contribution pour progresser. Puzzles lumineux, création de courants d’air vous propulsant dans des lieux inaccessibles, plate-formes végétales… autant de mécaniques contribuant au plaisir global de la progression et qui m’ont rappelé Genshin Impact. Une comparaison qui peut d’ailleurs s’étendre sur de nombreux aspects du jeu tant les deux titres adoptent une philosophie et une approche du gameplay similaires. Loin d’être un défaut, cela permet au contraire de ne jamais s’ennuyer lors des phases de jeu de Visions of Mana tant il s’évertue à sans cesse attiser notre curiosité. On se prend donc rapidement au jeu et on veut avancer toujours plus pour découvrir les prochaines classes, une nouvelle relique ou le donjon suivant.

S’il se rate sur son écriture, Visions of Mana se montre en revanche addictif dans son exploration et ses combats. Enchanteur, chill et coloré, c’est un plaisir de parcourir son univers qui fourmille de choses à faire sans se montrer trop long ou fastidieux. Magnifique porte d’entrée pour les néophytes, voyage nostalgique dans le passé pour les anciens, Visions of Mana pourra convenir à tout le monde grâce à sa générosité. Un retour réussi qui pourrait augurer de belles choses à condition que les ventes suivent et qu’un successeur à feu Ouka Studios soit trouvé…

AlxZ_Rex

AlxZ_Rex

J'écris mes articles à Rabanastre tout en recherchant mon courage dans Alien.

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